Introduction:

Nous ne devons pas perdre de vue qu’autrefois, il n’existait pas de village au sens ou nous l’entendons aujourd’hui, avec des limites bien définies et une administration communale.
On trouvait des terres ou des biens appartenant à un ou plusieurs propriétaires qui disposaient et dirigeaient chacun les personnes nécessaires à leurs exploitations.
Le propriétaire le plus important se chargeais souvent de faire construire et de patronner une église pour la communauté.

Avant 888:

L’empereur Arnould confirme la donation de Lustin à l’évêque de Liège.

L’empereur Arnould

Lustin est considéré comme un des principaux biens de l’évêque de Liège.
(confirmation de cette donation dans les 4 diplômes des empereurs :
-Otton II, le 06/01/980.

OttonII

-Otton III le 07/07/985, puis en 987.

Otton III

-Henri II le 10/06/1000.

Henri II

Le contenu exact de la donation n’est pas précisé.

Avant 901:

Donation par l’évêque de Liège (mort en 901) au Chapitre de Liège, de Lustin et de Maillen.
Le contenu exact de la donation n’est pas précisé (le détail des biens appartenant à l’évêque ne sont pas précisés.)

En 985: L’Avouerie

La fonction est exercée ou attribuée aux Mozet entre 985 (date de l’attribution du comté de Huy, dont fait partie la forêt d’Arche, au Prince Evêque de Liège, comme le signale la charte de 953 (1) ), et la première mention de la famille de Namur en 1087.
(de manière un peu plus précise entre 1000 et 1050).

Remarques :
Fonctions de l’avoué:
-remplacer l’évêque dans les domaines du judiciaires et de la protection militaire.
-à partir du Xlle s, décadence de la fonction qui devient surtout honorifique dans la principauté (l’avoué prend encore possession au nom de l’évêque des biens concédés).

Il faut remonter en 1350, pour encore trouver trace du relief de l’avourie de la cour de ND de Huy à Raës de Elezée, puis en 1370, pour son « Transport » au comte de Namur la relevant en fief de l’évêque de Liège.

En 1040:

Accord entre le comte de Namur et l’église de Liège, au sujet de leur juridiction respective sur différents villages, dont Lustin.

« Concordia inter comitem Namurcensem et capitulum super urisdictione villarum de Lustin, Maillen etc. anno 1040 »
( Bibliothèque centrale des Chiroux (Liège) manuscrit 954.,p 202).

Le comte et le chapitre de Liège ont par conséquent chacun, des droits et des biens à Lustin.
Quels sont les droits et les biens de chacun: ?

En 1661:

Convention entre l’évêque de Liège Théoduin et le comte Albert II de Namur, qui notamment :

L’abbaye Saint Gérard de Brogne.

-règle le problème du droit d’avouerie sur l’abbaye de Brogne.
-retire des mains du comte de Namur, le territoire qui est dans les mains du comte (procinctus) à Lustin, dans son intégralité, jusqu’à la rive de la Meuse

« Procincturn quoque de Lustin quod tunc tenuit, cornes remisit domo episcopo undique usque ad riparn Mosae » .

Il semble donc que :

-si le comte possédait des terres et/ou des bois à Lustin, ceux-ci deviennent alors propriété de l’ évêque et dans ce cas le comte ne disposerait plus d’aucun bien à Lustin ou, si le comte de Namur s’était accaparé de biens à Lustin appartenant à l’évêque, ceux-ci retournent à ce dernier.

-il s’agit bien d’un territoire, car on précise qu’il s’étend jusqu’à la Meuse, de façon à inclure probablement le droit de pèche. A ce sujet d’ailleurs, le « Terrier de 1602 » du comté de Namur précise que le chapitre N.D.de Huy, décimateur de la paroisse et seigneur foncier, possède et afferme la pêcherie de Lustin « depuis le rieu de Burnot jusques à la roche coppée à Fresnes » et que « les vennes dessous Taillfer » de cette pêcherie se réparent avec des matériaux tirés du bois des Acremonts.

En 1066:

Donation à l’église Notre-Dame de Huy, par l’évêque de Liège “Théoduin”,  de ses possessions à Lustin.

«cortem Lustin cum ecclesia et omnibus appendiciis suis»

Cette donation comprend le domaine de l’évêque à Lustin, y compris ce que l’évêque a acquis ou récupéré en 1061, ainsi que l’église avec tous les biens de celle-ci (inclus la dîme, le patronat…).

Dorénavant, le chapitre de Huy est le propriétaire foncier et le décimateur de la paroisse.
Voir l’article sur : La seigneurie de Lustin 

En ce qui concerne les limites du domaine, on trouve dans le Terrier de 1602 du comté de Namur que le chapitre de Huy est propriétaire du bois d’Acremont et du bois de Fresnes dans lesquels il laissait « manants jouir de ces bois, sans limites, moyennant le seul payement d’un pain de bois par ménage, chaque année.

Le 25/06/1070:

Diplôme de l’empereur Henri IV accordant notamment « l’immunité » au domaine de Lustin.

Le comte de Namur ou ses agents ne peuvent entrer dans ce domaine sous quelque prétexte que ce soit. Les droits de justice, lever des amendes, percevoir des impôts etc. appartiennent à l’église propriétaire du domaine (Chapitre N.D. de Huy).

26/07/1199:

Le traité de Dinant ou Paix de Saint-Medard (fin du différent d’Henri l’ Aveugle) :
Le comte de Bar et de Luxembourg reçoit « le domaine du comté de Namur situé entre l’Ardenne et la forêt d’Arche ».

Sauf s’il y un changement dont nous n’avons pas connaissance et qui ne serait pas repris dans le « Recueille sommaire des principaux titres et papiers concernants la terre et seigneurie de Lustin. ..», ce traité ne s’applique pas à Lustin, étant donné que :

-Le comte de Namur ne dispose plus de possession à Lustin depuis la Convention de 1061.
-Le domaine de Lustin appartient depuis 1066 au chapitre de Huy qui, en outre, jouit de l’immunité sur ce domaine.

De 1273 à 1275: Guerre de la vache.

Au cours de cette guerre qui s’est généralisée dans la région, les Liégeois du prince évêque réduisent en cendre la partie du duché de Luxembourg appelée le « Rendarche »(2).

Plus de 30 villages ou hameaux des 68 de la future prévôté de Poilvache, sont anéantis et une partie importante de la population exterminée.

Il semble que Lustin ne soit pas concerné par ses massacres étant donné que le domaine de Lustin est une propriété du chapitre de Huy, lui-même directement dépendant du prince évêque de Liège.

Par contre, le Terrier de 1602, signale que dans la mairie d’Arche, à Maillen, Mière, Courrière, Corioule, Sorinne-la-Longue et Assesse

« y at plusieurs maisons gastées et runyées comme estantes proches du grand chemin »

En 1343;

Le dénombrement des fiefs namurois de 1343, connu sous le nom de Papier Lombard, tout comme les actes de vente consentis par Jean l’ Aveugle en 1342 et 1344 à la comtesse de Namur, Marie d’ Artois, citent les dépendances du sire de Poilvache. (3)

Lustin ne figure pas, ce qui est tout à fait normal, l’avouerie de Lustin ne devant être vendue au comte de Namur qu’en 1350-1370.

En 1350: l’avouerie de Lustin.

Raës de Elezées devient l’avoué du chapitre de Huy, pour Lustin et toutes ses dépendances et annexes.

En 1370: L’avouerie de Lustin est vendue au comte de Namur.

Thibaut de Elezée cède au comte de Namur ce droit d’avouerie, le relevant en fief de l’évêque de Liège. Cette vente de la charge d’avoué au comte de Namur ne modifie en rien le titre de propriété, le comte relevant la charge en fief de l’évêgue de Liège et non du propriétaire foncier, le chapitre de Huy.

Cela signifie donc :

-que le comte de Namur remplace l’évêque dans les domaines du judiciaires et de la protection militaire, ce qui lui donne ainsi des droits et pouvoirs sur le domaine de Lustin, (droits et pouvoirs qu’il ne manquera probablement pas d’étendre selon la puissance ou la faiblesse du prince évêque de Liège).

-si le chapitre de Huy reste le propriétaire foncier du domaine de Lustin (seigneur foncier), le comte de Namur, et par conséquent son représentant, le prévôt de Poilvache, pourra user de ces droits et pouvoirs.

Le domaine fortifié de Poilvache

-Qu’a partir de ce moment, le domaine de Lustin continue à suivre la « coutume liégeoise » au sein de la Prévôté.
Remarque

A la fin du XIVe siècle, le comté de Namur était divisé définitivement en 9 district administratifs qui subsisteront jusqu’ à la fin du XVIIIe siècle (6 baillages, 2 mairies et 1 prévôté).

(2) Le 26 juillet 1199, par le traité de Dinant, le domaine de Poilvache passe du comté de Namur au comté du Luxembourg. La forêt d’ Arche (immense triangle entre les trois sommets Dave, Lustin, Andenne) faisait partie du baillage d’Entre-Sambre-et-Meuse et Arche. La région limitée au midi par ce bois fut adjugée par le traité au comte de Luxembourg et constitua la Prévôté de Poilvache. Les villages de cette prévôté qui étaient rangés le long de la forêt d’ Arche, c’est-à-dire Y voir, Godinne, Lustin et Arche étaient dits situés en Rendarche (rang, lisière de la forêt d’ Arche)

(3) « Le 1ivre des fiefs de la prévôté de Poilvache » par Léon Lahaye (1895).

Période Bourguignogne:
Souverain: 
Philippe le Hardi.

21/04/1399:

Charte de Guillaume de Flandre, comte de Namur, accordant certains privilèges aux villages de la mairie de Rendarche et d’Ywaing (Yvoy). (Remplacement de l’impôt « personnel » par une charge annuelle dont l’importance est fonction de la situation de chacun).

Fin du XIVe siècle:

Le comté de Namur est divisé définitivement en 9 districts administratifs qui subsisteront jusqu’ à la fin du XVIIIe siècle. Le district de la Prévôté de Poilvache comprend notamment diverses mairies, dont la mairie de Rendarche dans laquelle se trouve Lustin, et la mairie de Houx dans laquelle on retrouve Frappecul, Frênes et Tailfer. (4)

A noter: l’indépendance des diverses parties du village actuel de Lustin.

14/01/1400:

Concordat entre comte de Namur, et le chapitre de l’église ND de Huy au sujet des attributions respectives en matière de cour, cens, rentes et autres biens dans les villages de Lustin.

(Suite logique à la vente de l’avouerie en 1350/1370 qui n’aura pas  manquer de soulever des interrogations et différents conflits de compétence)

Période Bourguignogne
Souverain: Philippe III le Bon.

En 1430:

Destruction du château de Poilvache (qui ne sera pas reconstruit) par les milices dinantaises du prince évêque de Liège.
Dorénavant. les prévôts s’installent avec leurs cours à l’endroit où ils résident.

22/12/1465:

Les Etats de la principauté de Liège sont contraints de reconnaître le duc de Bourgogne comme avoué laïc héréditaire (le duc de Bourgogne est devenu comte de Namur en 1421).

Période Espagnole
Souverain: Philippe II.

15/09/1558:

Le prévôt qui entre en fonction et qui a la responsabilité d’établir les magistrats locaux, maintient en fonction les mayeurs notamment de la cour de Rendarche et de la mairie de Houx .

En 1584:

Le chapitre de Huy donne à ferme à Jean Rifflart de Lustin, pour une durée de six ans, les seigneuries de « Lustin, Maillen, Profondeville, Fresne, Frappe-Cul, dépendances, appendices, et tous les biens, cens, chapons, poulets, prés, bois, haies, dîmes, pêcherie, moyennant 310 florins à condition de fournir le feu, vin et ostie pour célébrer l’office »(5)

En 1593:

La mairie de Houx (ou Hour et Falize) qui comprenait, fin du XIVe siècle, notamment Frappecul, Tailfer et Frênes quitte la prévôté de Poilvache. Elle est réunie au baillage de Bouvignes de uis le 13/09/1593. (6)

Période Espagnole
Souverain: Philippe III.

En 1602:

Le « Terrier » de 1602 mentionne toujours que les chanoines de Huy sont les décimateurs de la paroisse et seigneurs fonciers à Lustin. De plus, il précise qu’ils ont affermé la pêcherie de Lustin «depuis le rieu de Burnot jusque à la roche coppée à Fresnes». Les «vennes de cette pêcherie dessous Taillefer se réparent avec des matériaux tirés du bois des Acremonts, et les manants ne peuvent pêcher qu’à quarante pieds (12 m) des engins du fermier »

Le terrier précise aussi

-que les bois des Acremonts et de Fresnes appartiennent également à ce chapitre.

-que Lustin comptait plusieurs grandes exploitations et notamment :

-celle que reçu en dot Jeanne de Crisgnée lors de son mariage avec Evrard de Maillen.

-« la cense et maison » (7)de Jeanne de Crehen, dame de Dhuy.

-« la belle maison et cense » de Jean Riffiart mais que ces nobles ne possédait aucun droit à Lustin, le chapitre de Huy, décimateur de la paroisse (8), y détenant aussi la seigneurie foncière.

A noter aussi qu’au XVIIe siècle, du point de vue paroissial, le village de Maillen faisait encore partie de la paroisse de Lustin. (9)

Période Espagnole
Souverain: Philippe IV.

09/05/1622:

Contrat entre le chapitre de l’église N.D. de Huy et Arnould Marotte pour l’aliénation des seigneuries de Lustin et de Maillen pour la somme de 25.600 florins. (Ce contrat entrera en vigueur après approbation et confirmation par les autorités supérieures ce qui sera définitivement fait le 22/12/1626).

Ce contrat est le premier document actuellement connu mentionnant que les habitants de Lustin, de Fresnes, de Frappecul et de Tailfer dépendent du même seigneur et donc de la même cour tréfoncière.

Remarque: Je n’ai trouvé jusqu’à présent aucun document précisant que Fresnes, Frappecul et Tailfer (qui faisaient partie de la mairie de Houx depuis la fin du XIVe siècle et qui sont passés dans le baillage de Bouvignes le 13/09/1593) ont été à un moment donné, réunis à la seigneurie foncière de Lustin appartenant au chapitre de Huy.

22/03/1623:

Acte de la cour tréfoncière de Lustin concernant l’hypothèque des biens des seigneurs Amould et Nicolas Marotte comme garantie pour l’acquisition de la seigneurie de Lustin. (La lettre ne concernant pas la seigneurie de Maillen)

11/09/1623:

Après comparution personnelle de « Arnould Marotte, Seigneur de Parfontville, Lustin, Maillen etc., » confirmation et approbation par la haute cour comtale de Feix, du contrat du 09/05/1622 relatif à l’aliénation des seigneuries de Lustin et de Maillen et au regroupement avec la seigneurie de Profondeville.

22/12/1626:

Arnould Marotte acquiert le titre de « seigneur hautain » des mains du Roi d’Espagne, Philippe IV «avec toute justice, amende et droit de chasse, sauf dans les bois du Roy».

A partir de cette date ce seigneur perçoit les deniers seigneuriaux (10) à proportion du vingtième, possède les droits de chasse, de pêche et d’afforage, mais il n’a ni droit de mortemain ni tailles (11) de cramats.

1740, fin de la Période Espagnole
1740-1792, Période Autrichienne sauf:
1789-1790, 
Etats-Belgiques-Unis (Indépendance)
1792, Période Française.

De 1622 à 1795:

Lustin reste une seigneurie laïque.
Voir l’article sur : La seigneurie de Lustin.

Le 01/10/1795:

Fin de la féodalité et passage au système français de l’administration départementale et municipale.

(4) Idem de Labaye.

(5) A.E.N. Lustin-Fonds communaux.

(6) Cfr : L. Lahaye « Le livre des fiefs de la prévôté de Poilvache »

(7) « cense » est /e nom donné aux métairies c’est-à-dire domaine rura/ exp/oité se/on /e système de métayage. sorte de bai/ à ferme dans /aque//e /e fermage consiste à une part de /a production du domaine.

(8) La paroisse de Lustin englobait encore le village de Maillen.

(9) Fr Album De Croy, tome XVI page 146

(10) Denier seigneurial : partie d’un capital ou revenu qui est prélevé au profit de quelqu’un. Dans le cas présent, le vingtième denier signifie un denier sur vingt (le vingtième).

(11)Taille seigneuriale: taxe frappant les biens fonciers.

La taille de cramat : droit du seigneur sur les habitants de son ressort et qui consistait:
-en corvées et prestations à fournir par les personnes et les bêtes ;
-en redevance en ou en nature.

Ecrit par: ColCCruce.
Chapitre III Fascicule A «Principaux évènements de l’histoire connue de Lustin, période 888-1795».

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